Bernadette Guiard – Laurent Vivès
20 Mai 2021
A la pointe du jour les oiseaux célèbrent le retour à la vie claire et vive.
Concert joyeux.
Sous la pluie ou le soleil naissant les rêvent prennent fin.
S’offre à nous la promesse d’un renouveau flamboyant.
Seul le regard attentif permet le miracle d’être et d’aimer.
Chaque geste, chaque mot, chaque élan, telle une embellie, honorent la vie claire et vive entre ailes et racines.
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« Comme avant », ainsi se formule dans la rue, l’espoir !
Il semble que chanter, rire et danser se cachent derrière cette expression répétée à l’envie.
« Comme avant », sans masques, sans gestes barrières, sans confinement ni couvre feu qui ont porté atteinte à la liberté de se rencontrer, de se rassembler, de circuler : Santé oblige !
« Comme avant » au temps banal et béni où l’on allait au restaurant, au cinéma, au théâtre, dans les musées, pour le plaisir de partager, d’être ensemble ou pour apprécier un bon spectacle.
« Comme avant » ? Comme si les conflits n’avaient jamais existé….
Comme si l état général du monde permettait de donner un avant goût du paradis retrouvé… Comme si chacun pouvait retourner à son quotidien, à ses habitudes dans une entropie bienheureuse…. Comme si la pauvreté s’était annulée d’elle-même….
« Comme avant » est empreint de nostalgie, effaçant les ombres, en particulier celles de la mort qui rôde et s’est propagée à cause d’un virus qui n’en finit pas de muter.
« Comme avant » à travers un plan de relance où l’argent coule à flots dans un climat de justice sociale enfin atteinte? C’est négliger deux composantes essentielles de la vie telle que les hommes la traversent :
– Celle d’une ambivalence inhérente à notre condition entre le bien et le mal qui régit la vie en société, la divise, la fige, jusqu’à, à l’extrême limite générer de la souffrance. Dans les organisations qui régissent les échanges professionnels et économiques, l’être humain est considéré de même nature, construit comme elles avec pour seule valeur l’efficience.
– Celle d’une résilience à saluer qui s’est traduite par une créativité née précisément des contraintes vécues. Grâce à sa créativité, l’homme se sauve. Il manie l’art de faire parler la matière, le mouvement, l’objet. Il imprime sa sensibilité, son imagination, son originalité son élan vital, détournant ainsi ce qui tente de l’aliéner.
L’expression « comme avant », passe partout, me laisse dubitative. Où tourner son regard ? vers le passé ? vers l’avenir ? Le présent exige t’il que l’on se penche sur le verre à moitié plein ou le verre au trois quart vide ?
Se donner l’intention de voir le meilleur renforce celui-ci. Voir le négatif l’accentue. Le choix m’appartient. Il ne s’agit pas d’oublier « l’avant » mais à coup sûr de s’engager dans un présent augmenté d’une expérience consciente qui nous élève.
Certes, un relâchement des tensions accumulées depuis plus d’un an s’impose. Certes, la culture y contribue et nous ne devons pas en être privés. Nous devons redonner des couleurs à nos vies incertaines.
Je suis convaincue que l’on doit donner la priorité aux valeurs plutôt qu’aux intérêts privés. Le sens des responsabilités n’est pas le seul fait des soignants, chacun saura s’engager pour un mieux être qui requiert respect et solidarité à incarner.
Que me dit ma petite voix intérieure ? « Des évènements extraordinaires partent de tout petits commencements »
Bernadette GUIARD
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Réponse de Laurent Vivès
Bernadette,
J’ai lu avec plaisir ton texte fin, intelligent, simple et nuancé, qui reflète bien nos états d’âmes à l’aube de ce début de déconfinement, espoir fragile dont on a du mal à discerner les contours tant l’être humain est imprévisible
L’histoire nous apprend qu’aux lendemains des grandes crises (dont les pandémies) surviennent des renouveaux bienfaiteurs. Mais on ne peut pas trop extrapoler. Le monde actuel n’a rien à voir avec celui d’il y a 50 ou 60 ans.
Des changements sont probables. Des traces resteront. Cette pandémie va marquer les esprits pour longtemps, bien sur pour les morts, mais surtout par les contraintes et les peurs qu’elle a engendrées. On devine déjà des évolutions à venir, des prises de conscience, des façons de vivre différentes.
Le virus ne va pas disparaître par enchantement et des adaptations seront nécessaires, même si beaucoup seront tentés de faire « comme avant ».
D’après moi cette épreuve a montré surtout 2 choses majeures à la fois : la grande capacité de réaction des êtres humains, contrastant avec la faible solidarité entre les nations, comme si chacun chez soi savait s’activer et essayer de faire ce qu’il faut en l’absence d’instances internationales cohérentes et efficaces.
On sait qu’il y a des disparités énormes entre les pays, concernant leur développement, leur organisation, leur système social et politique, mais aussi leurs cultures et leurs croyances. Or, les chiffres de la pandémie sont surprenants et ne reflètent pas bien ces disparités, qu’il s’agisse de la taille des pays, de l’importance de leur population, de leur situation géographique et de leur niveau socio-économique. Il y de nombreux pays qui n’ont eu aucun décès déclaré, d’autres ont des taux de décès et contamination importants (Andorre, république Tchèque, Brésil, Slovénie, Argentine, Pérou, Hongrie…). Au sein de l’Europe, la Belgique à une mortalité / millions d’habitants double de l’Allemagne.
Les statistiques sont elles solides? Les informations qui nous parviennent sont elles biaisées par les médias? Par exemple l’Inde affichée comme extrêmement touchée n’a que peu de décès en pourcentage.
La pandémie est un problème mondial, transfrontalier qui aurait du relever d’un plan d’action mondialement concerté et qui justifie la mise en place de mesures drastiques pour éviter d’autres attaques virales. Mais l’ONU et l’OMS (entre autres) ne sont pas à la hauteur pour cela.
Il y a eu aussi les victimes (décès et malades, crise économique, pertes d’emplois, dépressions, fermetures ou destructions d’activités) et les profiteurs (industrie pharmaceutique, e commerce, Asie orientale dont la Chine, les GAFA etc…).
Il semble y avoir une priorisation de la protection planétaire (tout le monde veut sauver la planète, en particulier les publicistes)
Finalement, un mal pour un bien? Des enseignements à prendre pour nous tous?
Les plus aptes et prédisposés feront, les masses apathiques suivront, les profiteurs continueront…
Coronavirus a révélé que nous sommes confrontés à une mondialité grandissante et rapprochée, interpénétrée, encore fort disparate, difficile à analyser, divisée, sans gouvernance mondiale, laissant libre cours aux minorités agissantes, via internet, aux contestations et affrontements parfois violents. Il n’y a pas si longtemps l’O.N.U. représentait encore quelque chose, elle avait des casques bleus, sa voix pouvait être entendue. On voit à travers le conflit Israélo-Palestinien l’impuissance des grandes nations à aider des peuples à vivre en paix. Certes le problème est ardu et complexe…
Coronavirus n’a pas réussi à apaiser les esprits dans cette région (et bien d’autres dont la pauvre Birmanie).
Nous aidera t’il à grandir et à changer?
Pour te copier Bernadette, je t’emprunte ta formule de fin:
que me dit ma voie intérieure?
« les grandes catastrophes sont parfois suivies de renaissances, mais les plus forts au départ remontent plus vite que les plus faibles ou fragiles »
Laurent Vivès
