Par Bernadette Guiard – Le 07.06.2023
Figée dans sa 5° saison, notre démocratie a perdu la raison !
Je pourrai poétiser mon propos en mettant en exergue la créativité, ressource à injecter dans la vie politique. Elle serait une arme non violente ! Un paradoxe ? En tout cas la démocratie est à ré-inventer sous peine de mourir. Les débats à l’Assemblée Nationale font penser à une cour de récréation, incontrôlable et bruyante, ou le fond disparait derrière la forme agressive qui y a cours et les décrédibilise tous.
Fuyant la politique, les citoyens font du tourisme. Les supermarchés sont les nouvelles églises, et quant aux Invisibles de tous horizons ils tentent une insurrection « coups et blessures »…
Pots de terre contre pots de fer, vaine lutte ou chacun est perdant. Que sont devenues l’éducation, la santé, la justice, la protection ?
Comme châteaux de cartes s’effondrent les institutions. La sève et le sens sont à ré-inventer. Écrasés d’informations, les esclaves consentants des écrans ont perdu de vue ce qu’est la communication. Présence – regard – parole – émotion ont disparues, laissant un vide, comblé par des mots secs comme des harengs-saur sans chair ni sang.
Sans boussole, tout dérive. Sans culture, tout sombre. Sans foi en l’humain tout prend fin. Seule prévaut la loi du marché accentuant les inégalités.
Peur du lendemain et colères légitimes poussent au suicide, à la fuite, à l’affrontement.
Que vaut une Constitution devenue lettre morte quant l’Esprit en est dévitalisé ?

Tandis que fondent les glaciers, que les incendies ravagent les forêts, que les migrants climatiques se noient en Méditerranée, les luttes intestines dévorent les énergies. Elles seraient plus utiles pour faire face à des défis vitaux ! Seule la solidarité prévaut. Coopérer permettra d’assumer ces défis, de les relever, de nous sauver.
Les consciences plongées dans un coma artificiel doivent se réveiller pour entendre les voix des enfants de la Terre qui ont choisi de suivre le courant de la Vie dépolluée de tous les excès. Sont à sauver ceux des cités, embrigadés. Sont à éduquer ceux qui ont abandonné tout sens moral. Sont à guérir les dépendants au sexe, aux stupéfiants, à l’alcool, à l’argent. Sont à rehausser les pauvres dans leur dignité bafouée.
Quand toute action sera orientée vers l’accompagnement, le soutien de toutes les vulnérabilités, alors, la Fraternité ne sera pas un vain mot.
En tant qu’institutrice militante j’ai tenté de promouvoir une pédagogie basée sur la coopération (travail entre pairs, tutorat), ou « l’enfant-chercheur » avait le droit de s’exprimer, de prendre des initiatives, de se tromper. A chacun depuis sa place de faire autorité, non pour s’imposer, mais pour autoriser chacun à être au mieux de ses capacités.
Enfin, la question du progrès reste centrale. Qu’il soit social, scientifique, technologique, il demeure d’abord l’affaire des hommes et de leur quête d’avancées en terme d’épanouissement. On voit bien les dérives et les effets pervers d’un progrès qui ne vise que la croissance économique et le profit ! Dans cette course à fond perdu, l’individu s’égare et le collectif se sclérose.
COMMENTAIRES
Par Laurent Vivès
Hé bien Bernadette, tu t’es « lancée ». Voila bien du courage, de la détermination et du bon sens. Vraie parole de citoyenne, qui bien que retraitée s’intéresse à tout et garde une vitalité de pensée rafraîchissante. Je me permet de compléter ton propos par quelques remarques que sa lecture m’ont inspirées :

1 – Le monde est en crise et il devient très difficile de l’analyser. Bien sur les menaces du dérèglement climatique et de la pollution prédominent et sont la première urgence. Les politiques s’en emparent, mais entre les paroles, les textes, les actions et leur résultats il y a un fossé. Le mal est bien plus fort que le remède, d’autant plus que le diagnostic semble insuffisant : la surpopulation et les modes de vies ne sont pas assez incriminés. Les inégalités se creusent, l’enrichissement d’une infime minorité se décuple, la violence persiste, le partage s’étiole, la gouvernance et la régulation ont bien du mal à exister.
2 – La rapidité des progrès technologiques engendre des mutations majeures déshumanisant nos vies, perturbant nos sociétés modernes (urbanisation exponentielle, dépendance aux réseaux sociaux, automatisations, perte du sens et du contact avec la nature, individualismes agressifs, perte des repères, etc…). L’intelligence artificielle et la robotisation inquiètent, l’avenir s’obscurcit.
3 – Les démocraties ont du mal. D’un idéal généreux on dérive vers des cacophonies inaudibles, ou chacun croit tout savoir et veut faire prévaloir son point de vue, son identité et ses désirs. A l’inverse, les régimes autoritaires prédominent, l’ordre et la discipline y prévalent, les libertés d’expression y régressent.
4 – Face à la mondialisation des problématiques, aucune institution n’apparaît apte à les résoudre et les évolutions ne sont pas maîtrisées. Pour exemple les libertés laissées aux GAFAM et le vide juridique face aux nouvelles techniques du numérique. Les acteurs de l’intelligence artificielle se font peur (en apparence ?) et réclament une régulation plus stricte.
5 – L’absence (ou le silence) de grands penseurs reconnus, capables d’embrasser la mondialisation son harmonisation entre les progrès techniques et sociaux et le passage d’une société basées uniquement sur l’hédonisme et l’exacerbation des profits, vers des organisations et des rapports au travail et à l’existence, innovants et censés.
6 – Le rôle des citoyens : ils désertent la vie politique au profit du dénigrement, de la révolte et des loisirs. Il n’y a plus d’engagement, les consciences sont aliénées, réifiées sous la poussée des médias, des règlements technocratiques et des contraintes.
Heureusement Bernadette, il y a encore des gens comme toi qui s’informent réfléchissent, dialoguent et ont le courage de s’exprimer. Merci, continue….